Henri Crolla, pour prolonger le bonheur de cette rencontre, propose à Georges Moustaki de l'accompagner chez Piaf avec qui il a rendez-vous. Il lui présente son nouvel ami en termes si élogieux que Piaf, un brin sarcastique, demande à écouter ses oeuvres géniales.

"J'ai pris une guitare et j'ai été lamentable. Mais quelque chose a dû la toucher. Elle m'a demandé d'aller la voir le soir même à l'Olympia et de lui montrer plus tard les chansons que je venais de massacrer".

Elle veut qu'il la connaisse mieux avant d'écrire pour elle. Elle enregistre fin 1958 "Eden Blues", "Les orgues de barbarie", "Le gitan et la fille".

Il figure au second plan de la pochette du super 45 tours "Edith Piaf chante Jo Moustaki". Elle lui demande une chanson sur un chagrin d'amour, un dimanche, dans la ville à ses yeux la plus triste du monde ce jour là, Londres. A la lecture du premier brouillon elle pointe du doigt le mot "Milord" : "La chanson est là !". Trois couplets jaillissent au fil de la plume. Piaf les confie à Marguerite Monnot pour la musique. Dès qu'elle le chante sur scène, "Milord" devient un standard. Au bout d'un an (et après "Faut pas qu'il se figure", "Un étranger", et "T'es beau tu sais"), Georges Moustaki déclare forfait.

A vingt-cinq ans, il entame ce qu'on qualifiera, à tord, de traversée du désert en auteur reconnu, couru par les interprètes :
Colette Renard - "Les musiciens"
Michèle Arnaud - "Pourquoi mon Dieu"
Dalida - "La fille aux pieds nus"
Yves Montand - "De shanghaï à Bangkok"
Cora Vaucaire - "Les amours finissent un jour"
Juliette Gréco - "Madame"
Tino Rossi - "Le pinzutu"
Barbara - "Vous entendrez parler de lui"

A l'occasion, Hugues Aufray ("Le jugement dernier") puis plus tard Pia Colombo (qui enregistre "Le métèque en 1964) puisent amicalement dans son tiroir d'auteur.

Georges Moustaki commence sa carrière discographique sous un nom d'emprunt - "Eddie Salem son orchestre et ses chanteurs arabes" - avec en 1960 un répertoire oriental - égyptien - puis grec - "Les enfants du Pirée" - et quelques rocks parodiques. Il défend ensuite sous son nom son répertoire en français sur une demi-douzaine de 45 tours ("La carte du tendre", "Dire qu'il faudra mourir un jour", "La mer m'a donné" etc...). Sa maison de disques finit en désespoir de cause par lui rendre son contrat.

 

Retour
Retour
Partie3
Suite